Nouvelles du Proche-Orient (Jordanie)

Publié le par Marco del Rugo

Ami(e)s de mes péripéties, Bonjour !

 

voyages-0716.JPGAnimé par une insatiable curiosité, j'ai donc quitté la Syrie après avoir fait un détour par le monastère Mar Musa, niché au haut d'une gorge d'où la vue sur le désert invite à méditer. Le père jésuite italien Paolo y fait revivre une communauté œcuménique. Au Sud, l'ancienne ville de Bosra, figurant au Patrimoine mondial pour son site archéologique cannibalisé par ses habitants actuels, plus particulièrement son théâtre romain miraculeusement préservé, a rapidement été visitée.

Dans le minibus pour me rendre à la gare routière, j'ai pu joyeusement échanger avec trois dames voilées et fort loquaces (nous étions seuls). Mais une fois quatre ouvriers embarqués, des hommes donc, elles sont devenues mutiques ! Au rythme des passagers qui sortaient et entraient, j'ai fait ami-ami avec le chauffeur Ahmed, mon contemporain. Mais il ne baragouinait que quelques mots d'anglais. Amineh, une jeune demoiselle montée par la suite et faisant office de traductrice arabe-anglais, permit au dialogue de s'enrichir. Je me suis aventuré à discuter de la mauvaise image véhiculée par la Syrie en Occident, image contrecarrée par les magnifiques jours passés dans ce pays. Tous les passagers intervinrent et la discussion, nourrie, fut intense. Notez que la demoiselle savait dire "Je suis célibataire", en français s'il-vous-plaît ! Par ailleurs, devant impérativement quitter ce pays avant minuit, expiration du visa oblige, je n'ai pu honorer l'invitation d'Ahmed, qui voulait me présenter sa famille :-(

Puis ce fut un jeune chauffeur de taxi à l'aspect cocaïnomane, père de trois enfants, qui me fit passer la frontière syrio-jordanienne. J'ai vite saisi qu'il faisait simultanément du trafic de cigarettes, arrosant le douanier et livrant sa marchandise 100 mètres plus loin ! En parlant de douane, mon visa jordanien a été établi au rythme du feuilleton TV qui semblait passionner le fonctionnaire multitâche. Dans la rue, à une effigie syrienne, celle d'el-Assad, omniprésente, succède une autre effigie, celle du Roi Abdullah II (accompagné souvent de son défunt père, Hussein), tout aussi présente dans l'espace public jordanien. Bienvenue en Jordanie !

Me voici donc à Irbid, une grande ville universitaire qui n'a aucun attrait pour retenir le touriste. Ayant pris froid (les nuits sont fraîches et les transports sont amis des courants d'air), en plus d'acheter une écharpe d'été, je suis entré dans une pharmacie. Et d'être accueilli en italien; le patron ayant étudié 10 ans dans la botte ! Il m'a refilé du Cirrus, un médicament fabriqué... par UCB Farchim, à Bulle !!! Et accessoirement, à l'entendre, bien sombre lui semble l'avenir, pire encore au Proche-Orient :-(

La capitale Amman, l'ancienne Philadelphie, n'a pas vraiment voulu de moi puisqu'elle m'a réservé un jour complet de pluie (bienfaisante sur ces terres arides). Qui ne m'aura nullement gêné grâce à l'accueil du patron palestinien du petit hôtel choisi. Grande est la générosité de ses habitants avec les gens de passage, plus ou moins long. Pour preuve, les centaines de milliers de réfugiés que la Jordanie a accueillis, qu'ils soient Palestiniens, Libanais ou plus récemment Irakiens.

C'est tout naturellement que ce pays tire son nom du Jourdain, le fleuve cher à Saint Jean-Baptiste, qui alimente la Mer Morte, située 400 mètres au-dessous du niveau habituel de la mer. Si quelqu'un vous affirme y avoir vu un requin, mettez en doute sa probité. Pour y avoir flotté grâce à une exceptionnelle teneur en sel, je puis vous le confirmer : aucun poisson ne peut y vivre (ce n'est pas pour rien qu'elle s'appelle Morte cette mer) ! C'est ici le pays de Moab, contrée de nombreux récits bibliques : Jericho, que Moïse aura contemplée depuis le Mont Nebo, où il est mort, Béthanie, où le Christ s'est fait baptiser, et autres Sodome et Gomorrhe, où il s'en passait des choses !

La grâce de l'inattendu, grâce qui m'est chère, m'aura encore une fois émerveillé me permettant d'assister au tournage d'un film de Bollywood avec la Mer Morte en toile de fond. L'actrice principale, Sana, a eu la gentillesse de poser avec moi pour une photo-souvenir :-) 

voyages-0265.JPGJ'ai rayonné sur ces différents endroits depuis Madaba, connue pour ses mosaïques romaines, une apaisante cité au Sud d'Amman, où j'ai été hébergé quelques jours dans un couvent grec orthodoxe. Les chrétiens y étant nombreux, j'ai assisté à l'illumination d'un sapin de Noël, fête animée par un groupe d'Évangéliques exaltés. De là, en route pour Kerak, ville abritant les ruines d'un des imposants châteaux des Croisés, en passant par le Wadi Mujib, impressionnante gorge surnommée un brin exagérément le Grand Canyon de Jordanie, où vivent encore quelques tribus bédouines. J'ai longtemps cru que les arbres plantés le long des routes servaient à contenir les fort nombreux détritus qui les jonchent. Mais après avoir vu une tempête de vent du désert, j'ai compris qu'ils étaient là pour tenter de retenir le sable soulevé violemment par le vent. La chose est impressionnante car une fois le bus embarqué dans la tempête, le chauffeur n'y voit guère plus qu'à cinq mètres ! Je comprends mieux maintenant pourquoi le faîte des arbres, tous penchés, ne se trouve parfois qu'à mi-hauteur.

voyages 0908De Kerak, où je fus victime d'une rocambolesque méprise quant au bus à prendre, la Route du Roi m'aura gratifié d'un spectaculaire paysage lunaire pour arriver à Wadi Musa. Ici était Pétra, l'ancienne cité nabatéenne, joyau du tourisme jordanien (sans doute le plus beau site du Moyen-Orient, avec les pyramides d'Égypte et Palmyre) et donc figurant elle aussi au Patrimoine mondial de l'Unesco. Après une impressionnante gorge (le sik), à une merveille nabatéenne succède une merveille romaine. Véritable enchantement. À la magnificence des monuments sculptés dans la roche multicolore s'ajoute la somptuosité des montagnes rocailleuses, sans oublier la générosité des bédouins animant le site. Vous marchez pour atteindre un sommet, vous vous posez là, admiratif, le corps bercé par la douce chaleur du soleil hivernal. Et vous contemplez les édifices millénaires, conscient des millions d'années qu'a mis Mère Nature pour façonner leur écrin. Vous vous sentez petit et à la fois grand, intégré que vous êtes à ce Grand Tout. 

"À  moins que tu n'y viennes, tu ne sauras jamais à quoi ressemble Pétra. Sache seulement que tant que tu ne l'auras pas vu, tu n'auras pas la plus petite idée de la beauté que peut revêtir un lieu." Ce sont là les paroles de T. E. Lawrence. Maintenant que j'y suis (et que donc je sais dorénavant la beauté que peut revêtir un lieu), je profite de lire son chef-d'œuvre de 944 pages "Les sept piliers de la sagesse" et me replonger ainsi dans les aventures qu'il a jadis vécues dans ces contrées. Cela tombe bien car ici à Aqaba, station balnéaire de la Mer Rouge d'où je vous écris, il n'y a rien à faire sinon se promener au soleil et adorer la beauté de l'instant. Seule entorse à ce farniente bienfaisant, le snorkeling, plongée avec masque, tuba et palmes : il y a là une barrière de corail parmi les plus belles du monde où batifolent des poissons aux multiples couleurs :-)

Autre originalité jordanienne : certaines pièces de monnaie sont heptagonales ! Par contre, originale, sa cuisine l'est moins. Mais comme Syrie, pays aux peuples frères, on y retrouve les fameux (et non moins délicieux) mezze, chers aux Turcs et aux Libanais. Ce sont des petits plats d'exquis apéritifs, tant chauds que froids, avec le humus qui règne en maître. Sinon, avouons que la cuisine syro-jordanienne n'est pas des plus variées : peu de légumes verts et question viande, c'est poulet ou mouton, avec plus rarement des camélidés.
Comme un goliard de jadis, je quitterai bientôt le royaume hachémite pour un autre pays mythique, l'Égypte, avec comme seul regret de n'avoir rencontré ni la sublime ancienne Reine Noor ni la ravissante actuelle Reine Rania ;-)

Aqaba, Jordanie, le 20 décembre 2010

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Vous pouvez visionner mes dernıers clıchés, soit la Jordanie, en cliquant ici.

Publié dans Voyages

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